La crise du COVID – 19, qui est toujours d’actualité, a eu, notamment pour conséquence, la fermeture en liquidation judiciaire de nombreux restaurants et certains pensent pouvoir en tirer profit.
Vous avez tous, sûrement, déjà entendu qu’acheter un fonds de commerce en liquidation judiciaire serait une bonne affaire !
Il est vrai qu’acheter à la barre du Tribunal peut être une bonne idée si et seulement si le projet a bien été étudié et les pièges évités.
Je vous dévoile ici les clefs de la réussite d’un achat de fonds de commerce en liquidation judiciaire après un bref rappel de la procédure d’achat durant cette période.
Propos introductifs : La procédure d’achat en liquidation judiciaire : une vente particulière :
Si acheter un fonds de commerce en liquidation judiciaire vous intéresse, il faut vous tenir informé des ventes en cours directement sur le site des administrateurs judiciaires. En Île de France, vous pouvez consulter le site de MJA ASSOCIES, qui est très souvent nommé par le Tribunal en qualité de liquidateur judiciaire.
Il faut bien comprendre que lorsqu’une société est placée en liquidation judiciaire, son dirigeant perd tous pouvoirs et la société est entre les mains du liquidateur judiciaire qui a pour seul objectif de remplir les caisses de la société afin de pouvoir éponger les dettes !
Dans cette perspective, les actifs de la société, essentiellement constitués du fonds de commerce, concernant les restaurants, vont être mis en vente dans le cadre de la liquidation judiciaire.
La vente se réalise sous le contrôle du Tribunal en charge de la liquidation judiciaire.
Plus concrètement, un cahier des charges va être établi par le liquidateur contenant les principales informations du fonds de commerce afin que l’offrant puisse formuler son offre.
Aux termes de ce cahier des charges, une date limite de dépôt des offres est indiquée avec, souvent la date d’ouverture des offres, qui peut en fonction des Tribunaux être fixée le même jour.
Par exemple, au Tribunal de Commerce de Paris, les offres doivent être déposées en matinée, souvent avant 11h00 et les offres sont ouvertes dans l’après-midi lors d’une audience se tenant au Tribunal ou en visio-conférence compte tenue des mesures sanitaires actuelles liées au COVID.
A l’issue de l’audience, deux possibilités :
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A l’issue de l’ouverture des offres, une offre sort du lot au regard généralement de son prix mais également des garanties apportées et c’est celle-ci qui est retenue par le Tribunal. Son auteur va devenir propriétaire du fonds. Le tribunal rendra une ordonnance autorisant la vente du fonds, qui interviendra entre celui dont l’offre a été retenue et le liquidateur ;
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A l’issue de l’ouverture des offres, le Tribunal considère que plusieurs offres sont intéressantes et, afin de faire jouer le jeu des enchères, organise un second tour, c’est-à-dire une seconde audience où les candidats ayant déjà déposé une offre vont pouvoir l’améliorer en tenant compte de la concurrence ! Lors de cette seconde audience, le Tribunal retiendra l’offre la plus intéressante et rendra une ordonnance autorisant la vente du fonds, qui interviendra entre celui dont l’offre a été retenue et le liquidateur.
Maintenant que je vous ai rapidement exposé le mécanisme de l’achat d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire, il est de temps de se pencher sur la méthodologie à adopter pour formuler une bonne offre de reprise en évitant les pièges.
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Les éléments « classiques » de l’offre
Aux termes de votre offre vous devez indiquer un certain nombre d’éléments dits classiques qui sont obligatoires :
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Identité de l’offrant
Vous devez vous présenter en indiquant l’ensemble de vos informations d’identité ou de ceux de la société si c’est une société qui formule l’offre.
Je vous recommande de détailler l’activité que vous exercez en joignant tous les justificatifs prouvant que votre activité fonctionne bien afin de rassurer le Tribunal (bilans, attestation de l’expert-comptable sur le chiffre d’affaires…)
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Concept
Vous devez indiquer au Tribunal dans le cadre de votre offre quel sera le concept que vous développerez au sein du fonds de commerce que vous souhaitez reprendre.
Pour ce faire, je vous recommande de mettre en avant votre expertise et de démontrer que vous êtes un professionnel de l’activité du fonds que vous souhaitez reprendre afin que le Tribunal soit convaincu que votre projet tient la route !
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Dépôt du prix de vente
En liquidation judiciaire, vous devez déposer le prix de vente, ou une partie en fonction du montant, par chèque de banque au moment du dépôt de l’offre.
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Délimitation de la reprise
Vous devez indiquer ce que vous souhaitez reprendre, le bail, les meubles, la licence…. Ces éléments sont en principe détaillés dans le cahier des charges, il faudra sur ce point être très vigilants !
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Les spécificités d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire
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La reprise du prêt inscrit sur le fonds de commerce
L’article L642-12 du Code de commerce prévoit que l’acquéreur d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire a l’obligation de reprendre le prêt ayant fait l’objet d’une inscription sur le fonds de commerce repris.
Plus concrètement, la société, en liquidation judiciaire, dont le fonds de commerce est l’objet des offres présentées, peut au moment où elle a pris le fonds de commerce avoir eu recours à un financement bancaire pour l’achat du fonds ou les travaux. Dans cette hypothèse, la banque procède à une inscription sur le fonds de commerce qui apparait dans l’état d’endettement, lequel est un document transmis par le greffe.
Il faut donc être particulièrement vigilant au document intitulé « état d’endettement » et vérifier qu’il n’y figure pas d’inscriptions de ce type.
Si tel est le cas, il faudra alors le prendre en compte dans la détermination du prix de l’offre.
Je vous recommande dans cette hypothèse, de tenter de négocier un abandon de créance avec la banque afin d’éviter de devoir reprendre la totalité du prêt.
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Les meubles acquis en crédit-bail
Il arrive souvent, notamment dans le milieu de la restauration, que le gros matériels (type frigo, cuisines…) soient acquis par le biais de crédit-bail.
Dans ce cas, le matériel n’entre pas dans le champ d’application de la cession, celui-ci n’étant pas la propriété de la société.
Il faut donc être très vigilants sur l’analyse des contrats transmis par le liquidateur et également sur les documents comptables afin d’être certain que les éléments nécessaires à l’activité soient bien répertoriés pour éviter toute mauvaise surprise.
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Le sort des loyers en liquidation judiciaire
En principe, en achetant un fonds de commerce, vous ne reprenez aucune dette.
Toutefois, en liquidation judiciaire les choses peuvent être différentes !
En effet, il peut être prévu plusieurs clauses au sein du bail, vous obligeant à reprendre une partie ou la totalité de la dette de la société liquidée envers le bailleur.
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La clause dite de solidarité inversée
Il est fréquent que le bail commercial prévoit qu’en cas de liquidation judiciaire, l’acquéreur du fonds devra, en sus du prix de vente, régler tous les loyers non payés par la société en liquidation judiciaire. Il peut donc s’agir des loyers antérieurs à l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire mais également des loyers postérieurs à la liquidation judiciaire.
Il faudra donc analyser consciencieusement le bail afin de pouvoir, en cas de paiement des dettes locatives, en tenir compte dans l’appréciation du prix de l’offre.
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La clause de garantie en cas de liquidation judiciaire
Le bailleur peut prévoir qu’en cas d’acquisition du fonds de commerce à la barre, l’acquéreur devra fournir une garantie telle qu’une garantie bancaire correspondant à trois ans de loyers.
Ceci s’explique par le fait que le bailleur, dont le locataire a fait l’objet d’une liquidation judiciaire, ne peut plus bénéficier de la clause aux termes de laquelle la société qui vend son fonds de commerce reste garante des loyers pendant trois années, la société étant liquidée.
Là encore, je vous recommande la prudence et également de tenter une négociation avec le bailleur !
Vous l’aurez compris, le bail doit faire l’objet d’une analyse précise afin d’éviter toute déconvenue.
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Le sort des salariés en liquidation judiciaire