ACTUALITE N°1
🎮L’arbitrage : un mécanisme adapté à l’esport ? 🎮
Avant de commencer notre nouvelle série de veilles juridiques sur l’esport ✨ toute l’équipe de Victoire Avocats vous adresse ses meilleurs vœux pour cette année 2025 ! ✨
🆕 Pour rappel, le 7 novembre 2024, Riot Games annonçait le lancement d’un mécanisme d’arbitrage pour résoudre les litiges de son écosystème esportif dans la région EMEA.
À travers une série de 4 publications, Victoire Avocats vous propose une analyse de ce mécanisme qui pourrait potentiellement changer la manière d’appréhender et résoudre les litiges au sein de l’écosystème esportif. A l’occasion des prochains posts, nous aborderons ses spécificités, son financement et la portée juridique des éventuelles décisions à venir.
Aujourd’hui, focus sur la notion d’arbitrage et ses éventuels atouts pour l’esport.
🔎 L’arbitrage est un mode alternatif de résolution des litiges permettant de soumettre un différend à un tribunal arbitral, composé d’arbitres, qui tranche de façon définitive en rendant une sentence arbitrale.
🤝 Ces arbitres tiennent leur pouvoir non d’une autorité nationale mais de la convention des parties.
📕 En droit français, l’article 1442 du Code de procédure civile dispose que, l’arbitrage repose sur une convention, appelée clause compromissoire ou compromis, par laquelle les parties confient la résolution de leur litige à un ou plusieurs arbitres, choisis pour leur expertise et indépendance.
Plutôt que de recourir aux juridictions étatiques, les parties opteraient ainsi pour une procédure juridictionnelle privée.
👍 Appliqué à l’esport, ce mécanisme pourrait présenter de nombreux avantages :
– Confidentialité : En droit français, la procédure arbitrale est soumise à une confidentialité de principe, sauf à ce que les parties en conviennent autrement.
Ainsi, tous les éléments échangés lors de la procédure, ainsi que la sentence arbitrale, seraient en principe confidentiels (Art 1464, alinéa 4 du Code de procédure civile).
– Liberté contractuelle : L’arbitrage permettrait d’adapter la procédure aux besoins des parties tout en visant à garantir l’équité et la légalité de la procédure arbitrale.
– Célérité : A l’inverse des juridictions étatiques devant lesquelles les procédures peuvent être soumises à des délais très longs, l’arbitrage pourrait permettre une résolution rapide du litige.
💡 Un atout pour l’esport : Globalement, dans un domaine aux contrats internationaux et enjeux financiers croissants, l’arbitrage constitue une solution moderne et équitable, répondant aux besoins d’un environnement en plein essor.
Autrement dit, sur le principe, l’esport a sûrement beaucoup à gagner à démocratiser le recours à l’arbitrage tant la filière est en perpétuelle évolution.
📅 Rendez-vous la semaine prochaine pour observer plus en détail la formule mise en place par Riot Games et ses équipes / partenaires.
ACTUALITE N°2
🎮 Les spécificités du Tribunal Arbitral de Riot Games en EMEA 🎮
Victoire Avocats vous propose de rentrer dans le détail de la solution proposée par l’éditeur (Bravo encore à Valérie Horyna et ses équipes!) avec l’ambition de créer “un nouveau standard pour l’esport”.
✅ Face à l’instabilité contractuelle croissante dans l’esport, Riot Games a en effet mis en place un mécanisme d’arbitrage global destiné aux litiges survenant :
– entre joueurs, entraîneurs et équipes
– des ligues officielles, de League of Legends et VALORANT(niveaux 1 et 2)
– dans la région EMEA.
📃 Ce mécanisme, dont le secrétariat est assuré par le cabinet d’avocats munichois Martens Rechtsanwälte, dispose de son propre règlement, présenté succinctement ci-dessous :
💸 Aux termes de l’article 1 du règlement, seuls les litiges liés aux salaires, primes, accords de transferts ou prix en argent sont éligibles à la procédure d’arbitrage de l’éditeur.
📄 Selon l’article 10, le secrétariat choisira pour chaque différend un arbitre inscrit sur la liste fermée des 14 arbitres officiant pour le Tribunal, accessible au lien suivant : https://urlr.me/9tnTN8
⚖️ En vertu de l’article 3, ces arbitres, indépendants, sont sélectionnés pour une période de 2 ans renouvelable et, conformément à l’article 17, ils doivent juger en fonction des principes d’é𝐪𝐮𝐢𝐭é (“Ex Aequo et Bono”), en n’omettant pas le caractère international des différends qu’ils ont la charge de trancher.
La procédure se veut également rapide et flexible puisque les différends ont vocation à être résolus entre 2 et 6 mois, sans que les parties n’aient l’obligation de recourir à un avocat (bien que cela reste conseillé afin d’assurer une défense efficace de leurs intérêts). D’ailleurs, la procédure peut inclure des audiences si l’arbitre en estime la nécessité selon l’article 15 du règlement.
🤫 Enfin, bien que la procédure, les détails du différend et les observations des arbitres soient confidentiels, les sentences seront en principe publiées, sauf ordonnance contraire de l’arbitre (à la demande d’une partie) selon l’article 18.6 du règlement.
🗺️ Avec cette nouvelle procédure d’arbitrage ad hoc, Riot Games semble souhaiter établir un précédent en région EMEA, sans qu’une extension à l’échelle mondiale soit totalement à exclure…
📅 Mais si cette politique d’arbitrage semble bien être globale, est-elle pour autant accessible ?
ACTUALITE N°3
🎮 Accessibilité financière du Tribunal arbitral de Riot Games : une aide innovante pour les joueurs et entraîneurs🎮
Victoire Avocats s’interroge sur l’accessibilité de ce mécanisme, traditionnellement réputé pour être relativement onéreux.
⚖️ En principe, un Tribunal arbitral couvre ses frais de fonctionnement, faute de subventions importantes, en demandant aux Parties de régler des frais de procédure (honoraires des arbitres, frais administratifs, frais liés à la location des locaux et autres dépenses organisationnelles).
À titre indicatif, ces frais peuvent rapidement atteindre plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’euros. Une telle charge financière peut rendre l’arbitrage difficilement accessible pour les particuliers ou les petites structures.
En l’espèce, le Tribunal arbitral de Riot Games suit cette logique classique, répartissant ses coûts entre les Parties en fonction de la valeur du litige, déterminée par leurs prétentions respectives. Concrètement, plus le montant en jeu est élevé, plus les frais d’arbitrage le seront également.
Toutefois, à la lecture de l’article 20.1 du règlement, il apparaît que Riot Games a cherché à intégrer un mécanisme visant à offrir une solution juste et équitable en créant un fonds d’aide destiné à soutenir financièrement les joueurs et entraineurs n’ayant pas les moyens de payer ces frais d’arbitrage.
🔑 En particulier, il est prévu que les demandeurs dont le revenu brut annuel est inférieur à 30.000 € peuvent bénéficier de ce fonds d’aide dès lors que :
– Le litige concerne un montant inférieur à 6 000 € (ce qui représente a priori un pourcentage non négligeable des affaires esportives nécessitant le recours à un arbitrage)
– Les demandes ne sont pas abusives ou vexatoires
– Le Tribunal n’est pas manifestement incompétent
✅ Le Secrétariat, chargé d’évaluer ces critères, pourrait, dans certains cas exceptionnels, accorder l’aide prévue, quand bien même les conditions ne seraient pas toutes remplies.
📕 En contrepartie, et pour financer ce fonds d’aide, il convient de préciser que lorsque la sentence arbitrale impose à la Partie perdante de supporter une partie des frais de procédure, l’article 20.5 du règlement prévoit une disposition particulière: si l’aide judiciaire a justement été accordée à la Partie perdante, cette dernière sera en principe condamnée à verser les montants correspondant au fonds d’aide, plutôt qu’à la Partie gagnante.
📅 Bref, après avoir analysé quelle était l’accessibilité financière de cette procédure d’arbitrage ad hoc, apprécions plus en détail la valeur juridique des sentences rendues par le Tribunal arbitral de Riot Games.
ACTUALITE N°4
🎮 Suite et fin : Quelle force contraignante pour les sentences arbitrales de Riot Games ? 🎮
Pour le dernier volet de cette série sur le nouveau Tribunal arbitral de Riot Games et ses spécificités, Victoire Avocats s’interroge sur la force et la valeur juridique des sentences de ce Tribunal.
🗺️ Si le Tribunal arbitral de Riot Games suit les normes internationales d’arbitrage, il n’en reste pas moins établi en Suisse, soulevant alors la question de la force exécutoire de ses décisions, notamment en France.
🙅♀️ En effet, en France, les sentences étrangères ne sont pas automatiquement revêtues de cette force exécutoire, c’est-à-dire de l’autorité nécessaire pour être directement exécutées.
❓ Dans ces conditions, si les sentences de Riot Games sont, en théorie, conçues pour être finales et obligatoires, que se passerait-il en pratique si une partie devait refuser de s’y conformer ?
Plusieurs éléments de réponse :
– Riot Games pourrait potentiellement appliquer des mesures disciplinaires (amende, etc…) conformément à son Code de conduite international de l’esport ;
– La partie lésée pourrait demander un exequatur auprès du Tribunal Judiciaire (procédure française relativement rapide pouvant conférer à la sentence la même force qu’un jugement étatique sur le fondement de l’article 1516 du Code de procédure civile).
⚖️ Le cas échéant, pour obtenir cet exequatur, la partie lésée devrait :
– Fournir une copie authentique de la sentence et de la convention d’arbitrage, accompagnée d’une traduction si nécessaire (CPC art. 1514).
– Veiller à ce que la sentence ne soit pas contraire aux principes fondamentaux de l’ordre public international, tels qu’interprétés en France.
📃 A noter en effet à ce titre que la Convention de New York de 1958, ratifiée par la plupart des pays de l’EMEA, facilite l’exécution transfrontalière des sentences à la condition qu’elles respectent l’ordre public local.
💪 Finalement, si l’arbitrage renvoie souvent l’image d’une procédure assez peu contraignante, c’est sans compter dans le cas d’espèce les sanctions disciplinaires internes que Riot Games s’est ménagée, ainsi que les recours juridiques solides pouvant donner aux sentences arbitrales la même valeur que des jugements étatiques.
🎮 Riot Games semble donc avoir pris la mesure de l’enjeu en cherchant à assurer une sécurité juridique certaine pour un secteur en pleine structuration !
🙏 C’est la fin de cette série d’analyses sur le Tribunal arbitral de Riot Games.
💡 Le cabinet reste à votre disposition pour toute question ou accompagnement juridique relatifs à ce Tribunal et, plus largement, au domaine de l’esport !