Droit Devant, le podcast de Maître Marylaure Méolans, avocate experte en droit du travail.
Mode d’organisation du travail éco-responsable pour certains, source de stress ou de mal être pour d’autres, le télétravail s’est massivement imposé ces derniers mois.
Aujourd’hui, dans DROIT DEVANT, j’ai le plaisir d’accueillir Isabelle Barth.
Isabelle est Directrice Générale et Directrice de la Recherche à l’INSEEC U, Professeur Agrégée, chercheur, manager.
Elle est également autrice de plusieurs ouvrages consacrés au management et plus récemment d’une étude sur le télétravail.
Dans cet épisode, Isabelle attire l’attention sur les dérives parfois constatées par les télé-travailleurs et nous propose des pistes pour y remédier et mettre en place une organisation efficiente et sereine.
Je vous laisse écouter notre échange :
Vous pouvez m’adresser des suggestions de thèmes que vous souhaiteriez voir aborder dans le podcast en m’écrivant : m.meolans@victoire-avocats.eu
Si le podcast vous plaît, soutenez-nous en laissant un avis 5 étoiles ou un commentaire sur iTunes :
Suivez l’actualité du cabinet VICTOIRE AVOCATS : Abonnez-vous à notre newsletter
Suivez-nous sur LinkedIn – Instagram – Facebook.
Retranscription du podcast :
Aujourd’hui, sur Droit devant, on parle de télétravail, une organisation écoresponsable pour certains, une source de stress pour d’autres.
J’ai le plaisir d’accueillir Isabelle Barth, qui va venir nous apporter son éclairage et son analyse sur ce mode d’organisation du travail. Isabelle est directrice générale et directrice de la recherche au sein du groupe INSEEC, un établissement de l’enseignement supérieur privé. Elle est aussi Professeure agrégée, chercheur, manageur. Dans ses articles et toutes ses communications, elle a à cœur véritablement d’affirmer sa volonté de faire cohabiter le monde de la recherche et celui de l’entreprise. Elle est aussi auteure de plusieurs ouvrages consacrés au management et, plus récemment, d’une étude dédiée au télétravail.
Avec Isabelle, nous avons évoqué le récent engouement pour ce mode d’organisation du travail. Isabelle nous explique les dérives souvent constatées par les télétravailleurs et propose des pistes pour aider à y remédier. Elle nous a aussi livré ses recommandations concrètes pour une organisation à distance parfaitement efficiente.
MM – Bonjour Isabelle et merci de me rejoindre sur Droit devant.
IB – Merci de cette opportunité d’échanges.
MM – Isabelle, vous avez un parcours qui est varié, des expériences professionnelles nombreuses, diverses, de la recherche, de l’enseignement, du management. J’ai voulu faire appel à vous parce que je sais que vous avez été et que vous êtes une grande utilisatrice du télétravail. Vous l’avez beaucoup pratiqué du fait de votre organisation familiale. Si j’ai bien compris, vous l’avez étudié. Vous avez écrit sur le sujet. Sans parler des études qui ont été réalisées sur le sujet et qui pointent du doigt certains travers du télétravail. Est-ce que vous, je veux dire, à titre personnel, êtes convaincue par ce mode d’organisation ?
IB – Alors oui, comme vous le dites tout à fait, je l’ai beaucoup, beaucoup pratiqué. Je dirais avant que cela devienne véritablement ouvert à tout le monde. Parce que, de par mon métier, je suis enseignant chercheur, je suis souvent à mon bureau, à mon domicile ou alors très nomade, et vais travailler dans un endroit différent. Et puis, en effet, c’est un choix. Je souhaitais concilier ma vie personnelle et ma vie professionnelle depuis longtemps, puisque j’ai six enfants et que c’était une façon aussi de pouvoir déconstruire mon temps professionnel pour rendre plus facile ma vie personnelle et vice versa. En effet, je pense que c’est quelque chose qui est de plus en plus demandé par les salariés, c’est quelque chose qui ouvre des opportunités formidables, à tout le monde.
MM – Et puis, c’est vrai que là, justement, ce mode d’organisation du travail revient avec beaucoup de force sur le devant de la scène. Et c’est vrai que l’on voit aussi des fervents opposants à cette pratique, et notamment au cabinet à titre personnel je vois des clients qui historiquement étaient plutôt réfractaires à la mise en place de ce mode d’organisation, et qui finalement, ont vu de par le confinement, que cela pouvait bien fonctionner. Et du coup, il nous sollicite pour rédiger des chartes de télétravail.
IB – Du point de vue managérial, en effet, cela fait longtemps que beaucoup de salariés demandent le télétravail, et c’est vrai, que les entreprises résistent. Quand on compare les chiffres, très peu de personnes ont accès au télétravail. On a moins de 30% des salariés d’après des études, en télétravail partiel, contrairement à la Scandinavie, où ils sont vraiment beaucoup plus nombreux. Et c’est vrai que des entreprises résistaient et avaient du mal à lâcher prise. En fait, et ce qu’il y a d’intéressant c’est que le confinement a obligé de nouvelles règles du jeu.
MM – Et du coup c’est vrai qu’on voit que le coronavirus va impacter nos pratiques à tous et notamment le monde du travail. Qu’est-ce que cela vous inspire ce nouveau monde qui se profile ?
IB – En fait il y a une accélération parce qu’il y avait quand même beaucoup de choses qui s’étaient mises en place depuis quelques années, avec Internet et les réseaux sociaux, etc. Mais en fait, on décloisonne les espaces et le temps, on a vu cette manière de travailler dans le monde entier, ce que faisait déjà beaucoup de gens. Mais dans le monde entier, de façon synchrone, sans pouvoir parler. Alors que de plus en plus, quand on est dans une entreprise ou une organisation on peut être amené à travailler avec le Mexique, l’Afrique ou la ville d’à côté, mais pas forcément avec des gens très près et sans se déplacer. C’est vrai que les déplacements étaient devenus de plus en plus une question de climat, de coûts aussi pour les organisations. Et puis, il y a aussi le décloisonnement des temps et c’est très intéressant. Je parlais tout à l’heure de ma vie personnelle, mais c’est ce qu’on appellera du « temps choisi », c’est à dire que je fais le choix. Ce que j’ai fait pendant des années, c’est de ne pas vraiment beaucoup travailler le mercredi parce que j’ai mes enfants et bien sûr les accompagnements, les organisateurs. Mais travaillez plutôt par exemple la nuit ou parce que c’est mon choix, le dimanche après-midi. Là, cela ouvre des horizons très intéressants.
MM – Et alors, vous avez mené récemment pendant le confinement, une étude sur le télétravail que vous avez d’ailleurs qualifié « Les Français ont mal à leur télétravail. » Est-ce que vous pouvez nous expliquer auprès de qui a été menée, cette étude ? Et puis, comment se sont déroulés vos travaux ?
IB – En fait, c’était une étude qu’on a menée en ligne avec des questionnaires pour comprendre un petit peu comment les gens évoluaient. Donc, on a eu plusieurs centaines de personnes qui nous ont répondu et c’est vrai que ce qu’on a constaté, c’est que ce télétravail, évidemment de façon accélérée et imposée, quand il n’avait pas été bien anticipé et bien géré, avait des effets qui n’étaient pas toujours très positifs sur les personnes. Donc, on a plutôt affaire là, dans ces cas, à une population de gens diplômés qui ont des conditions de travail, déjà qui ont la chance d’avoir continué à travailler. Et c’est d’autant plus inquiétant parce que ces gens-là sont plutôt des cadres, des manageurs et eux-mêmes ont souffert de cette période de télétravail imposée, accélérée et mal gérée.
MM – C’est vrai que ce que vous dites. Moi, j’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêts cette étude, mais en l’analysant, je me suis dit que c’était quand même très contextuel. C’est à dire que l’on traverse une période qui est quand même éminemment anxiogène. Dans votre étude, vous parlez « d’enthousiasme en berne », de « motivation raplapla ». Moi, ce que je comprends, c’est que c’est contextuel. Et cela ne signifie pas pour autant que le télétravail en soi est en danger, qu’est-ce que vous en pensez ?
IB – Le télétravail, n’est pas du tout un danger. Et il n’est pas du tout remis en cause. On va voir, comme vous le disiez tout à l’heure, de plus en plus de personnes le demander et d’entreprises le mettre en place. Cela, c’est une règle absolue. Ce qu’on a montré dans cette étude, c’est qu’il demande des conditions de travail spécifiques, un management adapté, ce qui n’a pas pu être le cas dans le cas du confinement, puisque du jour au lendemain, on s’est tous retrouvés en télétravail et qu’on a fait comme si c’était la même chose qu’au bureau. Et en fait, ce n’est pas la même chose, il faut adapter sa façon de travailler, de manager et cela n’a pas été le cas. Et c’est vrai que beaucoup de personnes, en dehors de l’anxiété générale, se sont retrouvées, mais littéralement asséchées par ces journées en enfilade. J’ai pu discuter au-delà de l’étude, avec plein de gens complètement épuisés à la fin de la journée par les mails, par Skype (…) sans avoir la possibilité de réfléchir, de respirer et en ayant l’impression de finir avec la tête complètement pleine.
MM – Oui, c’est à dire sans y être préparé. Et puis, avec l’environnement extérieur éminemment anxiogène que l’on connaît.
IB – Oui, je pense que même sans l’environnement difficile qu’on connaissait, un télétravail tel qu’on l’a pratiqué dans les premières semaines de façon générale, était de toute façon fatigant, épuisant et asséchant. Et c’est pour cela aussi que je pense que les entreprises qui vont maintenant s’y mettre doivent y réfléchir vraiment en profondeur.
MM – Justement, vous allez nous y aider, d’abord, sans parler du confinement de cette période, quand même très particulière quand on est en télétravail. En vitesse de croisière, si on peut appeler ça comme ça, quels sont, selon vous, les principaux risques et avantages que vous avez identifié à ce mode d’organisation ?
IB – Alors, le premier risque, c’est qu’au lieu de dessiner des frontières qui sont dans une conciliation vie privée/vie professionnelle, on va se retrouver complètement en percussion de sa vie personnelle et de sa vie professionnelle. Je m’explique, par exemple ne pas avoir un espace de travail sanctuarisé. C’est très important. On ne peut pas faire du télétravail sur la longueur, sur la table de la cuisine ou dans un petit coin de la chambre. Il y a beaucoup de personnes qui se sont plaintes d’avoir à travailler sur des petits ordinateurs portables et des tout petits écrans alors qu’elles avaient des tableurs Excel, par exemple, à gérer. Ce n’est pas le même confort visuel au bout d’une journée de travail, ou ne pas avoir une bonne chaise de bureau, c’est déjà des choses extrêmement importantes.
La deuxième chose c’est autant, évidemment, on adore avoir ses enfants, mais quand on se retrouve avec un enfant sur les genoux, ou qui tape à la porte du bureau, cela devient une charge mentale, un double chargement qui est extrêmement complexe à gérer. Donc là aussi, il faut trouver les frontières, le temps de travail et le temps personnel. Et puis aussi son intimité. Le télétravail, peut être vite pour d’autres personnes, une solution de facilité, et là, on se retrouve assez vulnérable à plein de sollicitations. Donc, c’est ce premier enjeu qu’il faut savoir poser et qui n’est pas toujours évident. Après avoir fantasmé beaucoup sur le travail à domicile, le télétravail, on peut se retrouver assez vite dépassé.
MM – Oui, avec des frontières assez poreuses, finalement, et l’impossibilité de bien scinder la vie professionnelle de la vie personnelle, ça, c’est clair.
IB – Deuxième sujet qui est important, c’est l’isolement. Les gens l’ont vécu, vécu de façon suraigu, l’isolement moral. Ce n’est pas parce qu’on est toute la journée au téléphone ou en Skype qu’en fait, on a des vraies relations. J’avais vu des études, et il n’y en a pas tant que ça qui montre qu’en fait, ça marche très. C’est très bien quand on est à peu près à sept ou huit journées dans le mois en télétravail, ce qui correspond à peu près à deux journées par semaine. C’est vrai qu’au-delà, on se retrouve quand même assez seul et beaucoup de personnes l’on vécut ainsi. Là, on monte en puissance sur les risques psycho-sociaux, sur le désengagement, sur la perte d’énergie. C’est un sujet à gérer.
MM – C’est vrai que là, dernièrement, on a vu beaucoup dans la presse des grandes entreprises qui commencent à communiquer. Pour celles qui ne l’avaient pas encore déjà instauré, annoncent vouloir le mettre en place de manière plus structurelle. Je pense par exemple à PSA, qui a annoncé que l’idée serait que les salariés ne travaillent plus sur site qu’une journée et demie par semaine. Vous, cela vous semble excessif comme rythme ? Parce que justement, ce que vous me disiez, c’est en fait finalement, sept/huit jours par mois, c’est la bonne formule selon les études qui ont été menées ou selon votre propre expérience ?
IB – Ce sont les études que j’ai retrouvées parce qu’il n’y en a pas énormément sur ces sujets-là. Quand j’ai fait mon tour d’horizon il y a quelques semaines, c’est vrai que ça me paraît beaucoup être une journée et demie par semaine sur le lieu de travail. Moi, je pense que c’est, comme toujours, un dosage en management et là, ça me paraît un peu excessif. Vous savez, il y a des professions qui travaillent beaucoup déjà en nomade ou en télétravail. Je pense aux professions commerciales que je connais très bien et pour qui il faut régulièrement faire des réunions d’équipe de façon très régulière.
On perd le lien tout de même et ça me paraît peu.
MM – L’idée, c’est effectivement de ne pas sentir un isolement trop grand.
IB – C’est ce qu’on a ajouté et ce serait la deuxième préconisation, la première étant de dessiner ces frontières, c’est aussi qu’il faut apprendre à travailler différemment.
MM – Alors justement, on va y venir, je sais que du coup, vous avez une grande expérience de cette pratique. Est-ce que vous avez des recommandations ? On a parlé de cette délimitation de la frontière, mais des recommandations, du coup à destination des chefs d’entreprise qui nous écoute et qui peuvent vouloir mettre en place le télétravail. Une sorte de « guide de bonnes pratiques ». Des idées pour réduire les inconvénients. Et puis des conseils, peut-être, pour les managers.
IB – Déjà, il faut que l’entreprise s’assure de gérer le confort de la personne salariée, c’est à dire être sûre qu’elle ait les mètres carrés nécessaires, qu’elle puisse avoir du matériel adéquat à disposition, Internet, avec une prise en charge de la connexion, un bon matériel informatique. Je pense aussi aux imprimantes. J’ai eu pas mal de collaborateurs qui n’avaient pas d’imprimante. A un moment, on est obligé quand même, de temps en temps d’imprimer des documents. Donc, il y a tout de même un investissement matériel : avoir une table, une chaise de bureau, etc. Et s’assurer aussi qu’il y aura des mètres carrés dans l’appartement ou dans la maison suffisants pour permettre ce travail.
MM – Des bonnes conditions de travail ?
IB – Oui, cela me paraît absolument essentiel. Après, il faut aussi former, aider les salariés à réfléchir. Naturellement, beaucoup de pères, mais surtout, j’imagine, de mères de famille vont vouloir le mercredi en télétravail et cela, c’est peut-être la fausse bonne idée. Cela paraît tellement plus simple, en plus, ça allège les coûts de garde, etc. Mais ça risque d’être véritablement ce que je décrivais tout à l’heure. Une collusion entre la vie personnelle et la vie professionnelle qui est vite ingérable. Et puis, c’est perdre à la fois en productivité ou en efficacité, puis en même temps, être frustré. Il y a une vraie réflexion sur les journées qu’on va choisir, c’est important. Et puis après, cela revient au mode de management. Il faut réfléchir à des métiers où les horaires sont importants. Je pense par exemple aux personnes qui vont être en relation client. Si vous avez un centre clients ou si vous êtes en relation avec des gens de l’extérieur, il vous faut des horaires. Vous êtes admettons ouverts de 9h à 17h. Par contre, si vous êtes sur d’autres métiers, il faut raisonner sûrement en mode projets, c’est à dire que la personne va pouvoir choisir la façon dont elle gère son temps, son énergie, à condition de terminer le travail en temps et en heure. Mais ça, ce n’est pas du tout le même mode de management et le même mode de contrôle qu’on a rendu au bureau. En situation classique, on se déplace dans le bureau, on communique entre collègues et il y a des choses qui vont se construire de façon complètement informelle. Et ça, on ne le voit pas mais ce sont des choses qui vont disparaître quand on sera à distance.
MM – Je lisais une étude de l’ANDRH, parce que l’un des travers qu’on a tous identifié, c’est aussi une hyper productivité. Ça rejoint tout à fait ce dont on parlait sur l’absence de frontières entre la vie professionnelle et la vie personnelle, de se connecter un peu à n’importe quel moment, dans un rythme parfois qui nous fait un peu perdre pied. Et donc, je lisais cette étude de l’ANDRH qui suggérait par exemple que les serveurs ou les outils en ligne ne soient pas accessibles en dehors des horaires de travail. Mais alors, vous nous disiez tout à l’heure bien aimer « cette possibilité de travailler le dimanche si je le souhaite et, à l’inverse, de me dégager des plages horaires qui sont plus ou moins conventionnelles ». Mais du coup, sur cette suggestion-là, de mettre une délimitation sur les horaires d’utilisation des outils, cela vous semble aussi une fausse bonne idée ?
IB – C’est un grand débat qui existe déjà. Vous savez, tout le débat sur les mails : on ne fait pas de mails après 17h, on n’en fait pas avant 9h, et on n’en fait pas dans un week-end, parce qu’il y a une ingérence dans la vie privée et l’inégalité aussi par rapport à la disponibilité. Et c’est vrai que pour moi, c’est un vrai débat parce que, j’avais écrit une fois un article « Internet est le meilleur ami de la mère de famille ». C’est vrai que pouvoir se dire je fais des choses à des moments, des heures qui ne sont pas des heures ouvertes, ça me libère du temps à des heures où j’ai envie de disponibilité. Ça me paraît un vrai choix personnellement, mais je peux comprendre en effet que des règles puissent être établies de façon à éviter cette surcharge mentale.
Après, c’est peut-être plus ce qu’on a fait dans beaucoup d’entreprises, avec des chartes de bonne conduite avec les mails : je parierai plus là-dessus. C’est à dire établir une charte de bonne conduite et de pratiques, plutôt que de rigidifier cela avec des accès ou non, par exemple, aux serveurs ou aux outils. Parce que le télétravail a quand même ce bénéfice du temps choisi, si on perd cela, je trouve que c’est tout de même dommage car on perd en flexibilité. Je crois que les gens ont envie de flexibilité parce que tout le monde est intelligent. En définitive, et hormis des interfaces très précises où on est obligé de répondre à un client, je crois qu’en dehors de ça, on est capable de s’auto-organiser sur beaucoup de missions. Une tâche qui contre la productivité dont vous parliez, c’est une vraie question parce que c’est ce qui s’est constaté pendant le confinement et le télétravail qu’on a subi. On n’a pas su, et en tant que manager, je plaide coupable : on n’a pas su s’organiser sur des plages tampons. Or, dans la vraie vie des entreprises, on va boire un petit café, marcher dans le couloir, sortir, avoir une visite client ou un rendez-vous, où on va avoir un temps de trajet. Et tout ça a disparu. Et du coup, tous ces temps qui sont des plages temporaires où l’on va par exemple démarrer une réunion avec trois, quatre minutes à papoter les uns avec les autres. Tout ça, avait disparu. Et il va falloir être capable à l’initiative des managers, de remettre ces pauses, ces « plages de respiration », aider les salariés à ne pas enchaîner les coups de fil et les réunions virtuelles pour justement se ressourcer, prendre un petit peu de recul et s’étirer physiquement. Je crois que c’est aussi quelque chose qu’il faut former.
MM – Une dernière question, comment est-ce que voyez-vous, aujourd’hui, le monde du travail de demain ?
IB – J’espère que l’optimisme va revenir, et je pense qu’il faut mettre en avant la notion de confiance. Et je pense que quand on est très éloigné en télétravail, il faut avoir beaucoup plus confiance dans ses équipes ou dans son manager en fonction de sa place dans l’entreprise ou dans l’organisation. Je pense qu’avec ces nouvelles méthodes, un outil n’est jamais neutre, un outil structurant la relation, et cela va nous obliger à avoir beaucoup plus confiance dans les personnes avec qui on travaille. Je trouve que ça ne peut être que positif et que cela demande un travail tout de même d’aménagement et de prise de réflexion, et non pas de « transposition bête » de ce qu’on faisait avant bien moins dans le présentiel.
MM – Merci pour cette note d’optimisme, pour cette dernière question. Je vous remercie, Isabelle, de la qualité de cet échange et je mettrai dans les notes de l’épisode toutes les références aux études dont on a parlé ensemble.
Ping Cadre juridique du télétravail et des frais des salariés – Xerfi Canal – Victoire Avocats