Les enregistrements audios clandestin #52

 

 

 

 

💥 Dans l’épisode d’aujourd’hui sur DROIT DEVANT, nous parlons de la recevabilité en justice des enregistrements audios clandestins, sujet récurrent d’interrogations chez nos clients. Jusqu’à récemment, selon une jurisprudence constante, le juge civil ne pouvait pas tenir compte d’une preuve obtenue de manière déloyale.

La Cour de cassation a cependant fait évoluer sa jurisprudence (Ass., Plén., 22 déc. 2023, n° 20-20.648), sous l’influence du droit européen.

Néanmoins, les mêmes questions continuent d’interroger nos clients :
⚡️Puis-je enregistrer mon employeur à son insu ?
⚡️Un enregistrement sans consentement peut-il être produit en justice ?

✨ A l’appui d’exemples concrets, on répond à toutes vos interrogations dans l’épisode ci-dessous.

On vous laisse le découvrir et vous invite à nous laisser 5 étoiles ⭐️ ou un commentaire 💬 sur ITunes afin de nous aider à faire connaître DROIT DEVANT au plus grand nombre.

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Retranscription :

Dans l’épisode d’aujourd’hui sur DROIT DEVANT nous parlons de la recevabilité des enregistrements audios devant la juridiction prud’homale, sujet récurrent d’interrogations chez les internautes.

Il y a quelques mois de cela, nous avons d’ailleurs réalisé une infographie sur la preuve déloyale et nous sommes aperçu à cette occasion que le sujet générait beaucoup de questions. On a donc décidé d’y consacrer un épisode de notre podcast.

Introduction

Jusqu’à récemment, selon une jurisprudence constante, le juge civil ne pouvait pas tenir compte d’une preuve obtenue de manière déloyale.

La Cour de cassation a cependant fait évoluer sa jurisprudence, sous l’influence du droit européen.

Dans ce podcast, nous reviendrons d’abord sur le régime de la recevabilité de la preuve en matière prud’homale dans son principe et ses limites (I) puis sur l’évolution récente du régime désormais applicable en matière d’enregistrements audios (II).

  1. La recevabilité de la preuve en matière prud’homale

Comprendre les règles de la preuve est crucial pour défendre efficacement ses droits.

  1. Principe : la liberté de la preuve

Devant le conseil de prud’hommes, le principe est celui de la liberté de la preuve. Contrairement à d’autres juridictions, devant la juridiction prud’homale, tous les moyens de preuve sont admis.

Cela signifie que la loi n’impose pas aux parties de produire un certain mode de preuve selon la prétention alléguée.

Selon la nature du litige, la charge de la preuve peut peser :

  • Sur l’employeur : par exemple pour prouver une faute grave (Cass. soc., 5 mars 1981, n° 78-41.806 Cass. soc., 9 oct. 2001, n° 99-42.204) ; Pour prouver le paiement du salaire (Cass. soc., 12 janv. 2022, n° 20-14.696).
  • Ou sur le salarié : le demandeur au procès doit prouver ses prétentions ; rapporter la preuve d’un préjudice résultant du manquement de l’employeur.
  • Ou être partagée selon des aménagements légaux notamment en matière d’heures supplémentaires ; de harcèlement ; ou de discrimination
  1. Limite : la loyauté et la licéité de la preuve

La limite est que la preuve doit être loyale et licite pour être recevable.

Avant les évolutions récentes, les limites à la recevabilité de la preuve ont pu soulever des difficultés :

  • D’abord, il y avait un risque qu’une partie soit privée de toute moyen de faire la preuve de ses droits.
  • Aussi, la différence de régime entre la preuve illicite et la preuve déloyale n’était pas très claire :
  • La preuve déloyale est celle obtenue au moyen d’un stratagème ou d’un dispositif clandestin de contrôle (vidéosurveillance, clients mystères, filatures, enregistrements sonores, etc.) devant être écartée par le juge civil. ( ass. plén, 7 janvier 2011, n°09-14.316 et n°09-14.667).
  • La preuve illicite est celle dont les conditions légales de mises en place du moyen de preuve n’ont pas été respectées. Par exemple, ne pas avoir informé le salarié de la finalité d’un dispositif de surveillance.

Sous l’impulsion de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, le droit à la preuve a pu progresser en matière civile (II).

  1. L’évolution récente du régime désormais applicable en matière d’enregistrements

Un enregistrement dit « clandestin » est un enregistrement audio ou vidéo réalisé sans le consentement de la personne concernée. En ce qu’il porte atteinte à la vie privée de la personne enregistrée, un tel enregistrement est déloyal.

Par un revirement de jurisprudence du 22 décembre 2023 (Ass., Plén., 22 déc. 2023, n° 20-20.648), la Cour de cassation a admis la recevabilité d’une preuve déloyale :

Dans cette espèce, un salarié avait été licencié pour faute grave. La preuve de la faute commise par le salarié était apportée par l’employeur par un enregistrement sonore d’un entretien réalisé à l’insu du salarié.

La Cour d’appel avait écarté les enregistrements clandestins au motif qu’ils avaient été obtenus de manière déloyale.

L’employeur avait alors formé un pourvoi en cassation.

Dans son attendu, la Cour de cassation juge d’abord que :

 « il y a lieu de considérer désormais que, dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats.

Cela signifie que la Cour de cassation ouvre la possibilité de produire une preuve déloyale ou illicite.

La Cour de cassation précise ensuite la méthodologie que doit suivre le juge pour apprécier la recevabilité de la preuve déloyale :

« Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble,

en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que :

  • cette production soit indispensable à son exercice
  • et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ».

Cette même méthodologie avait déjà été énoncée par la Cour de cassation dans un précédent arrêt du 30 septembre 2020 (n°19-12.058) dit « Petit Bateau » au sujet d’une preuve obtenu via un compte Facebook privé mis en balance avec le droit au respect de la vie privée.

Plus récemment, la Cour de cassation met en œuvre cette méthode de la “mise en balance” en matière d’enregistrement clandestin dans un arrêt du 17 janvier 2024 (n°22-17.474).

En l’espèce, un salarié demandait la résiliation de son contrat de travail en invoquant un harcèlement moral de son employeur.

A l’appui de sa demande, le salarié produisait la retranscription de son entretien avec les membres du CHSCT réalisant l’enquête harcèlement, qu’il avait enregistrés à leur insu.

Cette retranscription obtenue de manière déloyale est jugée irrecevable par la Cour d’appel car production de l’enregistrement n’était pas indispensable au soutien des demandes du salarié puisque :

  • le médecin du travail et l’inspecteur du travail avaient été associés à l’enquête menée par le CHSCT et étaient présents lors du constat établi par le CHSCT dans son rapport d’enquête
  • les autres éléments de preuve produits par le salarié laissaient supposer l’existence d’un harcèlement moral.

Ici l’enregistrement clandestin est écarté des débats car le salarié avait d’autres moyens de prouver les échanges et avait déjà rapporté la preuve – loyale et licite – de ses prétentions.

Ainsi, si la preuve loyale et licite sera toujours privilégiée, l’enregistrement clandestin reste une carte à ne pas sous-estimer !

Pour autant, une phrase enregistrée à l’insu de son auteur, sortie du contexte et utilisée déloyalement, peut avoir de lourdes conséquences.

La Cour de cassation aurait ainsi ouvert une boite de Pandore en permettant, avec des critères au contour flous, la production de preuves obtenues déloyalement.

Conclusion

C’est ainsi que se termine cet épisode sur l’amour au travail, j’espère qu’il vous a été utile. Je vous invite à nous laisser un commentaire ou une note cinq étoiles sur l’application iTunes pour nous aider à faire connaître encore plus largement ce podcast. Et je vous dis à très bientôt dans un prochain épisode de DROIT DEVANT.

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