Sport, Arrêts de travail et Indemnités Journalières

Arrêts de travail et indemnités journalières

 

Faire du sport peut parfois coûter cher… Analyse d’une jurisprudence récente, rendue par la Chambre civile de la Cour de cassation, condamnant une assurée au remboursement des indemnités journalières à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, pour avoir exercé une activité physique sans y être expressément autorisée par son médecin.

Les indemnités journalières pour arrêt de travail

L’indemnité journalière est une prestation en espèce, c’est-à-dire un revenu de remplacement versé par l’Assurance maladie (Sécurité Sociale)

Conditions pour bénéficier des indemnités journalières

Prérequis : l’arrêt de travail, prescrit par un médecin, doit être envoyé à l’employeur et à la sécurité Sociale sous 48h.

Les conditions pour en bénéficier diffèrent ensuite selon la durée de l’arrêt de travail du salarié :

Jusqu’à 6 mois d’arrêt de travail

  • le salarié a travaillé au moins 150h au cours des 3 derniers mois civils ou des 90 jours précédant l’arrêt.
  • ou bien le salarié a cotisé, au cours des 6 mois civils précédant l’arrêt, sur la base d’une rémunération au moins égale à 1015 fois le montant du Smic horaire (fixé au début de cette période).

Dans l’un ou l’autre cas, le salarié percevra des indemnités journalières sur la base de ses salaires, qu’il soit à temps complet ou temps partiel.

Au delà de 6 mois d’arrêt de travail

Pour continuer à toucher les indemnités journalières au delà de 6 mois, les conditions sont plus restrictives :

  • le salarié doit avoir été affilié à la sécurité sociale depuis au moins 12 mois au moins et avoir travaillé au moins 600 heures les 12 mois civils ou les 365 jours précédant l’arrêt.
  • ou bien le salarié doit avoir cotisé, pendant les 12 mois civils ou les 365 jours précédant l’arrêt, sur la base d’une rémunération au moins égale à 2.030 fois le montant du Smic horaire.

A combien s’élèvent les indemnités journalières ?

Le montant de l’indemnité journalière est égal à 50% du salaire journalier de base dans la limite d’un plafond, qui est de 52,28 € bruts / jour d’arrêt (au 18 juin 2024).

A partir d’un an d’ancienneté, le salarié pourra percevoir en sus des indemnités complémentaires de son employeur, portant son indemnisation à 90% puis à 66% du salaire journalier de base pour une durée comprise en 60 à 180 jours, en fonction de l’ancienneté et de la durée de l’arrêt de travail.

En effet,

  1. Pendant les 30 à 90 premiers jours d’arrêt selon l’ancienneté, le salarié percevra des indemnités, qui en complément des indemnités journalières, permettent de percevoir 90 % de la rémunération brute qu’il aurait perçu s’il avait travaillé.
  2. Pendant les 30 à 90 jours d’arrêt suivants, le pourcentage est abaissé aux 2/3 (soit 66,66 %) de la rémunération.

Gare aux activités non autorisées durant l’arrêt de travail !

Néanmoins, le Code de la Sécurité Sociale prévoit que son versement est subordonné à l’obligation pour le salarié bénéficiaire de “s’abstenir de toute activité non autorisée(article L323-6). 

…Ce qui nous amène au cas d’espèce tranché le 16 mai 2024 par la Cour de Cassation 

Activité sportive durant un arrêt de travail : une salariée condamnée au remboursement de ses indemnités journalières !

LES FAITS

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) demandait à une assurée le remboursement des sommes perçues par celle-ci au titre des indemnités journalières (3097,47€) pendant son arrêt de travail.
La CPAM considérait que l’assurée n’aurait pas dû les percevoir car elle avait exercé une activité physique non autorisée expressément.
Selon la CPAM, l’autorisation expresse et préalable d’exercer une activité ne pouvait pas résulter d’une attestation établie par son médecin a posteriori.

L’ENJEU

L’assurée exerçant une activité physique, non autorisée expressément par son médecin, pendant son arrêt de travail doit-elle rembourser les indemnités journalières à la CPAM ?

LA REPONSE DE LA COUR

Décision de la Cour de Cassation : Cass. 2e civ., 16 mai 2024, n°22-14.402

La Cour de cassation condamne l’assurée à payer à la Caisse primaire d’Assurance maladie la somme de 3097,76€ en :

  • rappelant que l’indemnité journalière est subordonnée à l’obligation pour la victime de s’abstenir de toute activité non expressément et préalablement autorisée.
  • relevant que les autorisations pour l’exercice d’une activité physique et sportive étaient établies a posteriori
  • estimant que l’assurée avait exercé, pendant son arrêt de travail, une activité physique et sportive « sans y avoir été expressément et préalablement autorisée par le médecin prescripteur », et ce, même si les attestations postérieures établissaient que la pratique d’une activité physique était vivement recommandée pour le traitement de sa pathologie.

La Cour de cassation fait donc une application stricte de l’article L323-6 du code de la sécurité sociale en sanctionnant l’assurée.

Cette décision sensibilise sur l’importance du respect des prescriptions médicales pour le bénéfice de l’indemnisation d’Assurance Maladie.

 

Cette jurisprudence est l’occasion pour nous de faire le point sur les arrêts maladie et leur contrôle, qu’il soit opéré par l’Assurance maladie ou par l’employeur. 

Le fléau de l’absentéisme

Le Baromètre annuel de l’Absentéisme publié par Malakoff Humanis depuis 7 ans révèle une hausse constante des arrêts de travail : en 2022, 42% des salariés se sont vu prescrire un arrêt maladie !

Outre le coût pour l’assurance maladie avec les indemnités journalières dont on vient de parler, le coût de l’absentéisme pour les entreprises est élevé.

Il faut en effet verser les indemnités complémentaires au delà des indemnités journalières, le remplacement éventuel par des contrats temporaires (CDD ou interim), gérer la surcharge qui pèse sur les autres collaborateurs et la désorganisation des services impactés, sans oublier le suivi administratif par le service des ressources humaines et le paiement des congés payés acquis durant la période d’absence.

A titre indicatif en 2022, la durée moyenne des arrêts longs était de 97 jours et 64% des entreprises ont connu au moins un arrêt long dans les 12 derniers mois

Que faire quand l’arrêt de travail se prolonge ?

Quand l’arrêt de travail de son salarié se prolonge, l’employeur peut vouloir s’assurer qu’il est bien justifié par les raisons médicales invoquées… et qu’il n’est pas le signe avant-coureur d’un désengagement du salarié préparant sa sortie.

Dans cette hypothèse, en tant qu’employeur, vous avez 2 options :

Diligenter un contrôle privé

L’arrêt de travail prévoit en général des horaires auxquels le salarié est censé être chez lui, en dehors des heures de “sorties autorisées” par le médecin qui a délivré l’arrêt de travail : à ces horaires de visite, l’employeur a la faculté de lui envoyer une contre visite médicale de contrôle à son domicile.

L’objectif est double : vérifier que le salarié est bien à son domicile aux heures d’interdiction de sortie (et pas parti en vacances…) et que son état de santé justifie l’arrêt de travail prescrit par son médecin.

Si le salarié, présent à son domicile, refuse de se soumettre au contrôle privé, vous pourrez suspendre le versement de ses indemnités complémentaires.

Et en cas d’absence prouvée et non justifiée du domicile lors du contrôle, le médecin-contrôleur en informe la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, qui pourra suspendre le versement des indemnités journalières.

Côté employeur, vous pourrez également suspendre le versement des indemnités complémentaires.

Ecrire à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie

En tant qu’employeur vous pouvez également saisir l’Assurance Maladie pour qu’elle prenne l’initiative d’une contre-visite médicale de contrôle au domicile de votre salarié.

Les arrêts de travail de complaisance coûtent cher à la collectivité et la Sécurité Sociale veille donc au respect des règles.

Victoire Avocats vous accompagne

Les arrêts maladie de complaisance donnent le pouls de la relation contractuelle avec vos salariés.

Ils sont extrêmement compliqués à gérer, en particulier dans les petites et moyennes entreprises qui n’ont pas de binômes sur tous les postes clés.

Quand il est le signe de la fin de l’engagement du salarié à vos côtés, un licenciement au motif réel et sérieux de “désorganisation de l’entreprise”, du fait des perturbations occasionnées par l’absence, est envisageable.

Si vous rencontrez pareille difficulté, nous pouvons vous aider à gérer la négociation de sortie avec votre salarié en arrêt de travail.

Contactez-nous ! 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *